Comment referme-t-on une année Capitale sans la clore vraiment ? Comment dit-on « merci » à un territoire tout en lui promettant un héritage ? Ces questions me trottaient déjà en tête lorsqu’avec Catalina nous avons franchi la frontière vers Nova Gorica, impatientes de vivre la cérémonie de clôture de Go!2025. On sait qu’une Capitale européenne de la Culture se construit par étapes – candidature, ouverture, année-titre – mais la clôture dit toujours l’essentiel : ce qui reste, ce qui circule, ce qui continue.
Go!2025, dès nos premiers pas, nous a rappelé que nous étions face à une première historique. Deux villes, deux pays, une seule Capitale. Deux villes, mais une même blessure. Ici, la frontière a longtemps été une douleur. Marcher sur cette frontière avec Catalina, c’était comme avancer sur une archive vivante : chaque pas rappelait le mur invisible, les postes de garde, la peur ordinaire. Pourtant, nous marchions aussi dans un nouveau présent : l’ancienne zone de contrôle devenue agora, les artistes ayant remplacé les lignes de surveillance par des lignes d’écoute, les postes de gardes par des postes d’imagination et la séparation par une chorégraphie du lien.
Et puis, il y a aussi l’héritage. Les anciens bâtiments frontières étaient devenus l’EpiCentre : ateliers d’artistes, maisons du récit, friches transformées en scènes ouvertes, jardins culturels, plateformes pédagogiques… autant de nouveaux usages inventés sur les traces de l’histoire. L’Italie et la Slovénie formant désormais un territoire culturel continu, porté par des lieux hybrides, des artistes solidaires, des échanges durables et une frontière franchie avec la simplicité d’un square.
Rapidement, nous avons fait la chaleureuse rencontre de nos homologues slovènes et italiens – équipe générale, curateurs, artistes et médiateurs. Ensemble, nous avons échangés des visions : celles où la culture n’était pas un programme, mais un tissu vivant de relations ; celles où l’art n’expose pas des réponses, mais créer les conditions de la rencontre ; celles où les territoires deviennent des corps sensibles à soigner. Aux détours de nos échanges, très vite, on sentait le local, et la ville entière vibrer, s’agiter… plus que quelques heures nous séparaient de ce final en grandes pompes.
Le soir, lors de la cérémonie, tout converge. La place autrefois dédiée aux contrôles devient scène ouverte. Chorégraphies, performances, installations lumineuses, basses techno, chants d’enfants : la ligne s’efface. Ce soir-là, ce n’était pas une fin. C’était une réparation collective. Une phrase circulait, douce et persistante : « Ce qui fut séparé est devenu fondation. »
La transmission du titre à Trenčín et Oulu n’avait rien d’un adieu : c’était une invitation.
Nous repartons avec des visages en tête, des alliances en germination et surtout une idée claire de ce que représente une cérémonie de clôture d’une année Capitale. Go!2025 n’est pas qu’un titre, c’est une impulsion qui ne fait que commencer, où inventer se pense sans frontières.
Bons baisers de la frontière italo-slovène.